Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé une mesure qui pourrait changer la donne pour de nombreux automobilistes : dès le 1er janvier 2024, les excès de vitesse de moins de 5 km/h ne seront plus sanctionnés par un retrait de points, mais uniquement par une amende de 68 à 135 euros. Une décision qui suscite des réactions contrastées, entre satisfaction des usagers et inquiétudes des associations de victimes.
Une mesure “compréhensive” pour les automobilistes
Dans les rues de Lille, l’annonce est accueillie avec satisfaction par de nombreux conducteurs, qui estiment qu’un petit excès de vitesse peut arriver à tout le monde, sans pour autant révéler un comportement dangereux au volant. Comme l’explique l’un d’entre eux, “on peut sans s’en apercevoir faire un petit excès, alors qu’on respecte les limitations en temps normal“. En effet, il peut arriver que l’on dépasse légèrement la vitesse autorisée par inattention, en regardant son GPS ou son compteur de vitesse, par exemple.
Pour ces automobilistes, la mesure va permettre de garder plus longtemps leur permis, en évitant les retraits de points pour des erreurs mineures. “Ça va permettre aux utilisateurs de garder plus longtemps leur permis et d’avoir moins de retraits de points, donc c’est plutôt pas mal pour ceux qui conduisent régulièrement et tous les jours, qui sont tout le temps sur la route“, souligne l’un d’eux.
Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, justifie cette décision par sa volonté d’être “compréhensif avec tous ceux qui prennent leur voiture pour aller travailler“. La mesure devrait ainsi s’appliquer à toutes les routes de France, quelle que soit la limitation de vitesse en vigueur.
Une tolérance qui inquiète les associations de victimes
Cependant, cette mesure ne fait pas l’unanimité, notamment chez les associations de victimes, qui rappellent que 3260 personnes sont mortes l’an dernier sur la route. Pour elles, le retrait de points pour des petits excès de vitesse a un rôle pédagogique, en incitant les automobilistes à respecter scrupuleusement les limitations.
“À chaque fois que l’on a envoyé un message d’infléchissement de la politique de contrôle sanction, ça s’est traduit par un relâchement des comportements et par la suite par une augmentation du nombre de victimes“, met en garde l’un de leurs porte-paroles. Les associations craignent en effet que cette mesure, loin d’améliorer la sécurité routière, ne l’aggrave en incitant les conducteurs à prendre davantage de risques.
Les petits excès de vitesse, un enjeu majeur pour la sécurité routière
Les dépassements de moins de 5 km/h représentent aujourd’hui environ 60% des verbalisations. C’est donc une part importante des contraventions qui ne sera plus sanctionnée par un retrait de points, ce qui pourrait impacter la prévention des accidents de la route. Les associations de victimes estiment en effet que ces petits excès de vitesse, bien que mineurs, peuvent avoir des conséquences graves en cas de choc, même à basse vitesse.
En effet, selon plusieurs études, la probabilité d’un accident mortel augmente de manière exponentielle avec la vitesse. Ainsi, une hausse de la vitesse moyenne de seulement 1 km/h entraîne une augmentation de 3% du nombre d’accidents mortels. Il est donc crucial de respecter les limitations de vitesse pour garantir la sécurité de l’ensemble des usagers de la route.
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Permis de conduire: Gérald Darmanin annonce la fin des retraits de points pour les petits excès de vitesse en 2024https://t.co/7SvO74SPA2 pic.twitter.com/2elHyB7i6G
La mesure, un cadeau empoisonné pour les futurs élus locaux ?
Cette décision intervient alors que les élections municipales approchent à grands pas. Certains élus locaux pourraient voir dans cette mesure une opportunité de séduire les automobilistes, mais aussi un moyen de relancer le débat sur la sécurité routière et les limitations de vitesse. En effet, de nombreuses communes ont déjà procédé à des baisses de vitesse sur leur territoire, pour des raisons de sécurité ou de pollution.
Il n’est pas exclu que certains candidats aux élections municipales s’emparent de cette mesure pour promettre la fin des retraits de points pour les petits excès de vitesse sur leurs routes communales. Toutefois, ils devront également composer avec les inquiétudes des associations de victimes, qui ne manqueront pas de leur rappeler que la sécurité routière doit être une priorité pour les élus locaux.
Vers une évolution des politiques de contrôle et de sanction ?
Cette mesure interroge également sur l’évolution des politiques de contrôle et de sanction en matière de sécurité routière en France. Faut-il privilégier les sanctions financières aux retraits de points, pour mieux cibler les récidivistes ou les comportements les plus dangereux ? Ou au contraire, faut-il maintenir un système de retrait de points pour tous les excès de vitesse, afin de garantir un respect strict des limitations et une meilleure prévention des accidents ?
Ce débat, qui agite depuis longtemps les spécialistes de la sécurité routière, prendra sans doute une nouvelle ampleur avec l’annonce de cette mesure. Reste à savoir si elle permettra d’améliorer la sécurité sur nos routes, ou si elle contribuera, au contraire, à renforcer les comportements à risque des automobilistes.
En attendant, les usagers de la route doivent se préparer à un changement de taille dès le 1er janvier 2024, date à laquelle les retraits de points pour les petits excès de vitesse seront officiellement supprimés. Une mesure qui promet de faire couler beaucoup d’encre, et qui interroge sur les enjeux de la sécurité routière en France.